Longtemps ignorées par les historiens, les sociétés africaines anciennes n’ont rien à envier à celles de l’Occident ou de l’Asie.
L’Afrique, berceau de l’humanité, regorge d’histoires et de mystères liés à des civilisations anciennes qui ont façonné le destin du continent. Bien que souvent éclipsées par les grandes civilisations d’Occident ou d’Asie, les sociétés africaines ont laissé derrière elles des traces fascinantes de leur existence. Les civilisations disparues d’Afrique témoignent de la richesse et de la diversité de l’histoire du continent. Explorer ces sociétés oubliées permet de mieux comprendre les racines de la culture africaine.
Antiquité : Pount, le mystérieux partenaire commercial de l’Égypte
De l’or, de la myrrhe, de l’encens, du bois d’ébène, des jarres de vin… Pount, c’était le pays de Cocagne des Egyptiens. Mais où se situait précisément cette terre opulente vers laquelle les pharaons envoyèrent des bateaux dès le XXVe siècle avant J.-C. ? On ne sait pas exactement, mais les échanges semblent avoir eu lieu dans les alentours de la mer Rouge– quelque part entre le Soudan, l’Érythrée, la Somalie et le Yémen actuels. Était-ce un pays ou une zone de commerce ? Rien n’est sûr. Le témoignage le plus direct sur les Pountiens est gravé sur les murs du temple de Deir el-Bahari, près de Louxor, dédié à Hatchepsout: des bas-reliefs racontent les expéditions vers Pount commanditées par la célèbre reine. Le site a survécu dans la mémoire africaine : en 1998, une région de Somalie a proclamé son autonomie sous le nom de Puntland.
Représentation d’une maison sur pilotis du pays de Pount. Relief du temple d’Hatchepsout à Deir el-Bahari. Neithsabes/Wikimedia Commons
De 1000 avant J.-C. à 200 après J.-C. : les Noks, fascinants artistes de l’âge du fer
Appauvrissement des sols, changement climatique, guerres, famines ? Les raisons de l’effacement de la culture nok, au centre du Nigeria actuel, sont incertaines. Les intempéries et l’acidité des sols ont laissé peu de traces de cette société, que l’on connaît principalement au travers de ses statues en terre cuite, une technique que les Noks semblent maîtriser dès le début du premier millénaire avant notre ère. Ces œuvres extraordinaires sont les plus anciennes connues de l’Afrique subsaharienne, l’âge d’or débutant à partir de 500 avant J.-C. C’est grâce au fer que la culture nok s’est épanouie, sans passer par la case « bronze ». Les fouilles ont permis de découvrir 13 fours de fusion permettant de fabriquer de solides outils, avec lesquels l’agriculture a pu se développer. Comment ont-ils appris à fondre le fer? Là encore, mystère…
Sculpture Nok revendiquée par le Nigeria. Musée du quai Branly au Louvre, Pavillon des Sessions. Wikimedia Commons
De 800 avant J.-C. à 600 après J.-C. : les Garamantes, anciens seigneurs du désert
Grand peuple berbère du Sahara, les Garamantes ont bâti au Sud de la Libye une civilisation longtemps sous-estimée. Les cités, dont la capitale Garama, récemment découverte par les archéologues, commerçaient avec le monde romain (qu’ils pourvoyaient notamment en esclaves), mais celui-ci finit par imposer sa domination. Si un système de puits et de canalisations permettait de vivre dans un environment désertique, il est possible que la surexploitation hydrique ait causé le déclin du royaume.
Les tombes des Garamantes, en Libye. Alamy Stock Photo
Du XIe au XVe siècle : Grand Zimbabwe, une puissance médiévale disparue
Longtemps attribuée aux Phéniciens, la cité du Grand Zimbabwe est bel et bien l’œuvre des Shonas, un peuple bantou. Prenant son essor au XIe siècle, la ville, constituée de murailles circulaires de pierres, a compté jusqu’à 18 000 habitants et vivait principalement du commerce de l’or extrait dans la région. Sa société extrêmement développée était capable de creuser d’immenses puits pour stocker l’eau en vue des sécheresses. Son déclin, au XVe siècle, pourrait avoir coïncidé avec un effondrement du cours du métal précieux dans les échanges autour de l’océan Indien.
Le Grand Zimbabwe, un ensemble de ruines d’une cité médiévale d’Afrique méridionale. Jan Derk/Wikimedia Commons
Du IX au XIVe siècle : la cité d’Ifé dévastée par la peste
Au XIVe siècle, la cité-État yoruba d’Ifé, célèbre pour ses statues de bronze au troublant réalisme, vit dans l’opulence, la prospérité et la paix avec ses voisins. Pourtant, cette ville du sud-ouest de l’actuel Nigeria se vide brusquement de ses habitants, qui semblent fuir en abandonnant leurs biens sur place. La terrible peste noire, qui ravage l’Europe à la même époque, est l’explication la plus plausible à cet effondrement. L’Afrique ne vivait pas coupée du reste du monde et les échanges commerciaux ont apporté la pandémie jusque dans la zone subsaharienne.
sculpture de la civilisation Ifè. Terre cuite, Nigéria, XIIe-XIVe siècle. Musée du Louvre.